
2 - LES CARNETS
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/ suite de l'épisode 1 LA PORTE /
Avoir dessiné sur ma porte avait ouvert un chemin ou plutôt un appétit.
Je ne me rappelle plus vraiment comment j'ai commencé à colorer les couvertures de carnets Moleskine mais en en trimbalant toujours un avec moi et attirée par les surfaces noires, ça devait couler de source.
Le processus me ravissait. Je laissais les points faire leur chemin et parler. Une certaine sorte voulait absolument de l'ordre et filer droit, d'autres clamaient leur liberté et sortaient du rang. Quand apparaissait, au gré du hasard, une forme qui me faisait penser à quelque chose de connu, je l'accompagnais.
Je ressens encore l'émotion quand dans mon studio parisien, en pleine nuit, Phemonoe est apparue. Je l'ai posée contre le dossier de la chaise et je l'ai toisée longuement. Je n'en revenais pas. C'est comme si elle était là de sa propre volonté qu'elle s'était seulement révélée. Je la trouvais si belle que cela ne pouvait venir de moi.
Faire des points est devenu un refuge où je pouvais néantiser toute volonté ou autre velléité de contrôler l'instant. J'ai pointillé des heures, tant et tant que cela en devienne indécent dans une société de l'immédiat et de la valeur travail.
/ la suite : épisode 3 - LES TOILES /